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En effet. Je m’étais engagée auprès de mes lecteurs, rencontrés au fil des conférences et des salons du livres, qui se plaignaient des séries qui n’en finissaient plus, de ne pas étirer la sauce et de m’en tenir à la trilogie. MAIS! Lorsque j’ai mis le point final au troisième tome de La Saline, j’ai éprouvé un profond chagrin à l’idée de quitter ces personnages auxquels je m’étais profondément attachée.
J’ai donc téléphoné à mon éditrice de l’époque, Monique H. Messier, et je lui ai confié ma peine tout en lui rappelant mon engagement auprès de mes lecteurs. Elle m’a conseillé, avec assurance : « Tu as des personnages secondaires assez forts pour imaginer l’histoire de 4 ou 5 d’entre eux et donner naissance à autant de romans uniques et indépendants. Tes lecteurs n’auront pas besoin de lire la trilogie pour goûter chacune de ces nouvelles histoires. »
Monique avait été l’une des trois productrices des « Filles de Caleb ». Elle avait donc expérimenté le conseil qu’elle me donnait en produisant « Blanche ».
Mon chagrin m’a quitté d’un coup. Je savais déjà quels personnages je choisirais : Anne Alarie (La Jeune fille au piano), Judy O’Shaughnessy (L’Amérindienne), Marie-Ange, Rébecca et Benjamin Ricard (Vent du large), Marie-Louise Peltier (L’Héritière devenu SHAWINIGAN FALLS).
J’avais d’abord titré mon manuscrit « La Légataire » en pensant au caractère déterminé qu’avait légué le docteur Antoine Peltier à sa fille Marie-Louise, surnommée Loulou. Au cours de la révision éditoriale, Nadine Lauzon, mon éditrice, m’a suggéré ce titre que j’ai adopté avec beaucoup d’émotion. Voir le nom de ma ville natale sur la jaquette de mon livre m’émeut encore.
En effet. Monique m’a accompagnée à partir de 2001, donc à compter d’Anne Stillman : de New York à Grande-Anse. En septembre 2014, sur son lit d’hôpital, aux prises avec une récidive de cancer, Monique m’a demandé de lui remettre les quatre premiers chapitres de La Jeune fille au piano. Elle a pris le temps de les lire et de me donner ce commentaire par téléphone : « Continue dans cette veine, tu es très bien partie. » Monique est décédée quelques semaines plus tard… Johanne Guay, vice-présidente à l’édition du Groupe Librex, avait promis aux « orphelins de Monique » de leur assigner une nouvelle éditrice. Je me disais que personne ne pourrait remplacer ma chère Monique. Si vous saviez la confiance que doit avoir un écrivain envers son éditeur! Dans son livre « L’Art d’écrire », Pierre Tisseyre compare leur relation à celle d’un couple. Johanne a tenu parole et a organisé un rendez-vous. Lors de notre première rencontre, Nadine a su désamorcer mes craintes avec son « Je n’ai pas la prétention de remplacer Monique ». J’ai rapidement apprécié sa compétence et sa grande humanité. La tendresse et l’admiration dont elle teinte son discours quand elle parle de Monique m’a conquise.
1. J’ai choisi Marie-Louise, surnommée Loulou, comme personnage principal. Je la voulais volontaire et tenace comme son père, le docteur Antoine Peltier, le héros de la trilogie La Saline. Il ne faut pas oublier que j’ai mis cette enfant au monde à la fin du tome 2. Je suis très attachée à Loulou, il va sans dire.
2. L’époque où je ferai évoluer Loulou… Lorsque j’ai rencontré Pierre, mon amoureux pour la vie, j’avais 17 ans et demi. Je me souviens très bien de l’intensité de mes sentiments et de la profondeur de nos conversations. J’imagine facilement les combats et la détermination de Loulou à pareil âge. Comme je l’ai fait naître le 24 décembre 1891, le prologue de SHAWINIGAN FALLS est daté du 24 juin 1909.
3. Le lieu principal de l’action… Il fut décidé le 23 juillet 2017 lors d’une entrevue dans le cadre d’une activité des bibliothèques de Shawinigan nommée Bibli O Vent. Patricia Powers me recevait peu après la publication de L’AMÉRINDIENNE, deuxième volet DANS L’UNIVERS DE LA SALINE. Me retrouver au parc St-Maurice, un haut lieu de mon enfance, m’a remuée. Je souviens très bien avoir dit à Mado, ma sœur-amie qui m’accompagnait : « Mon dernier volet DANS L’UNIVERS DE LA SALINE se déroulera ici même, dans notre ville natale ». C’était clair comme de l’eau de roche.
4. Les motivations profondes qui me guideront dans la création de ce livre? De 10 h 07 à 10 h 15, le 3 décembre 2018, je rédige ce qui suit :
POURQUOI J’ÉCRIRAI LA LÉGATAIRE (on se souvient que c’était le premier titre choisi pour SHAWINIGAN FALLS) :
A. Pour boucler les boucles ouvertes dans les six livres précédents, soit la trilogie, en plus des trois volets déjà publiés « Dans l’univers de la Saline »;
B. Démontrer qu’une fille volontaire, intelligente et débrouillarde telle que Loulou peut se laisser dominer un temps et voir comment elle réussira à secouer le joug que Charles tente de lui imposer.
C. Explorer ma zone d’ombre à travers celle de Charles;
D. Fouiller l’âme d’un être foncièrement méchant, ce que je n’ai jamais fait auparavant;
E. Faire revivre Shawinigan, 9 ans après sa fondation.
J’avais longtemps médité les « Pourquoi j’écrirais ce livre », ce qui explique la rapidité de la rédaction de cette section.
En janvier 2004, je suis allée visiter la maison de Nérée Beauchemin à Yamachiche. J’étais en pleine écriture des Carnets de Cora, dernier tome de la trilogie dédiée à Anne Stillman mccormick. Le salon de cette admirable demeure m’a impressionnée au plus haut point. « Un jour, un de mes personnages se retrouvera ici », me suis-je dit, sans même me soucier du réalisme de ce désir. Quand, en 2009, j’ai pensé présenter un projet à ma directrice littéraire, ce moment de 2004 s’est imposé. Il me restait à trouver qui serait ce personnage.
Depuis 1995, j’avais développé une belle amitié avec le poète Clément Marchand, éditorialiste et journaliste au défunt Bien public. À noter que Clément a fêté son 100e anniversaire le 12 septembre 2012, sept mois avant son décès le 22 avril 2013. À chacune de nos rencontres ou presque, Clément m’entretenait sur Nérée Beauchemin. Poète comme lui, il l’avait honoré en publiant, dans les années 1970, un choix de ses meilleurs textes au Bien public, maison d’édition qu’il dirigeait. Il a piqué ma curiosité et je me suis finalement rendue à Yamachiche, là où Beauchemin a vécu.
Loin de moi cette idée. J’avais goûté aux plaisirs de la fiction avec Lunes bleues et je souhaitais poursuivre dans cette voie.
Ce personnage qui rendra visite au docteur Nérée Beauchemin, j’aimerais bien qu’il soit son égal Pourquoi pas un médecin? Nérée Beauchemin voue une passion pour la poésie. Intéressant volet à exploiter… J’imagine mon héros jeune, désireux de profiter de l’expérience de Beauchemin… Né en 1850… mort en 1930… À 40 ans, bel âge pour échanger avec un novice… Je choisis donc 1890 comme début de ma nouvelle histoire.
Le docteur Antoine Peltier deviendra mon personnage principal. Pour qu’il ne soit pas un rival de Beauchemin, je préfère qu’il demeure hors de Yamachiche, mais pas trop loin, puisqu’on se déplace en voiture en cheval en 1890. J’étudie une carte de la région. Louiseville? Saint-Sévère? Saint-Paulin? Saint-Léon-le-Grand… Ce pourrait être Saint-Léon-le-Grand. Une compagne de classe et un compagnon de travail y ont déjà habité. Peut-être accepteraient-ils de m’outiller?
Une rencontre avec René Lupien, administrateur à l’université d’Ottawa, maintenant à la retraite, désireux de faire de l’église de Saint-Léon-le-Grand un édifice patrimonial, et une autre avec Lucien Bellemare, professeur émérite en philosophie, devenu l’historien du village. Ces deux hommes m’ont parlé avec emphase d’un hôtel internationalement connu au XIXe siècle. La réputation des propriétés quasi miraculeuses d’une source d’eau minérale qu’exploitaient le St. Leon Springs Hotel, appelé La Saline par les villageois, dépassait les frontières. L’hôtel accueillait l’élite politique et religieuse du Québec, en plus de riches touristes venus d’aussi loin que de la Nouvelle-Angleterre ou de l’ouest du Canada.
Par le biais de la clientèle de La Saline, Saint-Léon possédait une ouverture sur le monde. Le docteur Antoine Peltier deviendra le médecin attitré de l’établissement.
Pas du tout! Nous nous déplacerons, entre autres, à Montréal, à Québec et à Trois-Rivières. Ainsi, il m’a été possible de décrire le Québec urbain et rural de la fin du XIXe siècle.
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La Saline est un roman historique. Tout ce que le lecteur peut vérifier, soit l’actualité du temps, les détails de la vie quotidienne, la manière dont les gens de cette époque accomplissaient leurs tâches, leurs métiers, leur environnement, ce qu’ils mettaient dans leur assiette, tout est véridique, même le coût de certains produits. Par contre, tous les personnages sont fictifs, sauf Nérée Beauchemin. Les émotions et les sentiments sont pure invention. Heureusement! Quel bonheur que de donner vie à des personnages en toute liberté, sans oublier la vraisemblance!
Tout à fait. J’ai puisé mes renseignements dans les revues médicales publiées entre 1885 et 1892. Comme j’ai enseigné la Terminologie médicale pendant 25 ans, j’étais à même de comprendre ce vocabulaire spécialisé, puis de le rendre digestible à mes futurs lecteurs.
Je me consacre à la recherche en vue de rédiger cinq livres, cinq romans historiques. Chacun d’eux fera revivre un personnage issu de La Saline et, en grande partie, dans un autre lieu que Saint-Léon-le-Grand. Nul besoin d’avoir lu la trilogie pour savourer chacune des histoires. Cependant, les lecteurs de La Saline retrouveront, à l’occasion, et je l’espére avec bonheur, le village de Saint-Léon et quelques-uns de ses habitants.
Le troisième tome de la saga d’Anne Stillman était encore sous presse lorsque j’ai présenté à mon éditrice une ébauche de ce qui deviendrait Lunes bleues. Elle l’a soumise au comité éditorial de Libre Expression. On m’a offert de signer un contrat d’édition. Au même moment, un éditeur des Éditions Médiaspaul, par l’entremise du directeur des communications du diocèse de Trois-Rivières, m’a demandé de rédiger la biographie de l’abbé Roland Leclerc. Comme j’étais très loin de l’Église et des curés, je n’avais pas l’intention d’acquiescer, d’autant que mon engagement contractuel avec Libre Expression me donnait une excellente raison de refuser. J’ai tout de même réclamé une semaine de réflexion et, après plusieurs consultations, incluant les décideurs chez Libre Expression, qui étaient prêts à reporter l’échéance de mon contrat, j’ai accepté de relever le défi. Je croyais m’investir un an dans ce projet et j’en ai mis trois, mais l’homme et les découvertes faites en cours de route valaient le détour.
Le désir d’écrire une fiction m’est venu pendant la rédaction des Carnets de Cora, troisième tome de la trilogie dédiée à Anne Stillman McCormick. L’histoire débute en 1877, soit deux ans avant la naissance d’Anne. Le contexte historique de même que tous les événements vérifiables ont été respectés, mais plusieurs vides ont dû être comblés, dans la vraisemblance, il va sans dire. J’ai tellement pris plaisir à imaginer ces inconnus que je me suis dit : « Quelle belle aventure ce serait que d’écrire une pure fiction! »
Sophie Richard, l’héroïne de Lunes bleues, s’est souvent manifestée pendant la rédaction de la biographie de Roland Leclerc.
Les gens capables de résilience. J’admire ceux qui rebondissent face à l’épreuve!
Pour être bien honnête, j’ai accepté avec enthousiasme la suggestion de mon éditrice, Monique H. Messier. Comme je l’explique dans ce roman, Sophie Richard se passionne pour l’astronomie. Les mois de notre calendrier grégorien varient de 28 à 31 jours, alors que le mois lunaire en compte 28. Forcément, il arrive un moment où on observe deux pleines lunes au cours d’un même mois, un phénomène tout de même assez rare. On a donné à la deuxième le nom de lune bleue. La rencontre de Sophie et de Philippe et l’intensité de leur relation relèvent également de l’exception. En outre, chacun d’eux s’offre une deuxième chance. Voilà pour l’analogie.
Sophie Richard est une battante, une carriériste, une femme d’affaires à la tête d’une entreprise d’organisation d’événements, qu’elle a fondée et développée à force de travail, de persévérance et d’ingéniosité. Faiblesse et sentimentalité n’ont aucune place dans sa vie. À la mi-trentaine, elle collectionne et évalue ses amants au même titre que ses succès professionnels. La performance, voilà ce qui lui importe, jusqu’au jour où son corps flanche. Un bien mauvais tour du destin. Une fois de plus, sa détermination se manifeste lorsqu’elle exige de son médecin un délai de deux semaines avant de se soumettre tout traitement ou toute intervention. Elle s’enfuit sur la Côte d’Azur, la seule destination où elle s’était permis de s’évader quelques jours, de temps à autre. Pour mieux s’y retrouver, Sophie quitte les endroits à la mode et découvre, dans un authentique petit village médiéval, qu’elle n’est pas que cérébrale. Une autre Sophie se manifeste, sensuelle et… sentimentale.
J’ai visité des dizaines de villages en Provence à la recherche du lieu idéal pour que MA Sophie vive sa renaissance. Pourquoi la Provence? N’est-ce pas un merveilleux endroit pour se réapproprier ses sens? La cuisine et les vins… les odeurs… les couleurs… la lumière… la chaleur… J’ai éprouvé un véritable coup de foudre lorsque je suis entrée à Saint-Martin de Castillon. Ce petit village, tout en pierre, à proximité du massif du Luberon, n’était même pas répertorié dans les guides touristiques. Ce site en dehors du temps ne compte qu’un seul gîte, un seul café-bistro.
J’y suis revenue deux ans plus tard et j’y ai vécu autant de temps que Sophie y vivra. C’est fou tout ce qui peut se passer en une semaine dans la vie de Sophie Richard!
Évidemment! Sans jamais trahir les confidences recueillies, j’ai tout de même multiplié ma plage d’expériences par quelques milliers!
Des récompenses. Comme les cadeaux, elles ne sont pas nécessaires, mais je les accueille avec bonheur. Les prix du public – et j’ai été gâtée de ce côté – représentent à mes yeux des bulles d’amour! Je remercie la « sagesse des foules ».
J’ai soumis chacun des trois tomes de la Saga d’Anne Stillman McCormick à une dizaine de lecteurs, avant la remise du manuscrit à mon éditrice. Six d’entre eux étaient là depuis le tout début. Il s’agit de gens de gros bon sens n’ayant aucune condescendance à mon égard : mon amoureux – le plus sévère de tous – ma sœur-amie, une ogresse de littérature, deux amis musiciens qui avaient le mandat de vérifier le rythme, une professeure de littérature et un ex-éditorialiste, également docteur en théologie, ce que j’ai appris bien plus tard, et qui s’est avéré une ressource inestimable avant la publication de Roland Leclerc, par delà l’image.
Un de mes musiciens est décédé il y a deux ans. Cet ami précieux nous manque terriblement… Au noyau du départ s’ajoutent, au besoin, des spécialistes de contenu. À titre d’exemple, pour Anne Stillman – Le procès, une avocate et un journaliste ont été mis à contribution; pour Lunes bleues, deux médecins : une généraliste et un neurologue. Pour La Saline, deux autres docteurs, Maurice Roy et Yves Demers, m’ont prêté main-forte, et Alain Revil, un érudit d’origine française que j’ai rencontré au Costa Rica en 2010, découvre des erreurs là où personne ne l’aurait soupçonné.
Pendant presque un an et demi, j’ai consacré mes temps libres à la rédaction de textes destinés à trois centres d’interprétation qui ont ouvert leurs portes le 13 juillet 2010 au Parc des chutes de la petite rivière Bostonnais, à l’entrée de La Tuque. Le premier traite des activités humaines qui ont marqué l’histoire de la rivière Saint-Maurice (ma belle rivière!) et le deuxième est dédié à Anne Stillman McCormick, cette philanthrope qui a choisi la Haute-Mauricie pour y « tuner » son âme pendant près de soixante ans, celle-là même qui m’a inspiré les mille cinq cents pages de la trilogie d’Anne Stillman. Des objets et des documents se rapportant à ses passions et à ses activités y sont exposés.
On m’a aussi confié la rédaction des nouveaux panneaux thématiques d’un troisième centre d’interprétation, celui de Félix Leclerc, centre qui existe déjà depuis une dizaine d’années, où photos et objets en lien avec Félix nous rappellent l’artiste et son époque. Saviez-vous que notre poète chanteur est né à La Tuque en 1914? Son premier roman Pieds nus dans l’aube nous transporte d’ailleurs dans cette ville où il a vécu son enfance et le début de son adolescence.
J’ai également eu le bonheur d’animer 54 émissions de télévision d’une demi-heure chacune intitulées Par delà l’image, diffusées au canal MAtv et à Cogéco. Il s’agit d’entrevues avec des personnes connues ou à connaître, qui partagent leurs valeurs, leurs passions, leurs projets et leur philosophie de vie.
Depuis mon enfance, je rêvais d’écrire, tout en doutant de trouver un sujet suffisamment intéressant pour m’investir dans une aventure pleine d’inconnus et de risques. De fait, j’avais toujours de bonnes raisons de reporter ce projet : la vie de couple, les enfants petits, l’enseignement. Tout devenait un obstacle. En réalité, j’avais peur de me lancer! J’y ai mis trois conditions : premièrement trouver un sujet captivant, croyant ainsi me protéger du syndrome de la page blanche, deuxièmement que ce sujet m’amène à faire des recherches et, troisièmement des voyages.
Il y a plusieurs années, mon beau-père a acheté un camp de bois rond dans la forêt qui avait déjà appartenu à Anne Stillman McCormick (du nom de ses deux maris). Pendant plus de cinquante ans, elle a loué, sous bail à la province de Québec, un territoire de cinq cents milles carrés, délimité au nord et à l’ouest par la rivière Vermillon, et par la rivière Wessonneau au sud. Elle y avait fait construire ou rénover des dizaines de camps. Une trentaine d’employés guidaient, surveillaient et entretenaient ces propriétés.
Plusieurs des anciens qui habitaient sur ce territoire parlaient d’elle avec émerveillement ou la décriaient. Ils ont piqué ma curiosité et, le 12 août 1992, j’ai interviewé l’un d’eux, le médecin attitré d’Anne Stillman McCormick lors de ses séjours au Canada, le docteur Louis-Alexandre Frenette. En préambule, il a vanté son originalité, sa générosité et son érudition. À sa deuxième phrase, le docteur m’a révélé d’un air mystérieux : « Il y a eu un procès… en 1922 ou en 1931, je ne sais plus… » Il m’a appris que James Alexander Stillman, premier mari d’Anne et président de la National City Bank, la plus importante institution financière en Amérique, a accusé sa femme d’infidélité avec Frédéric Beauvais, un jeune guide amérindien de Caughnawaga, aujourd’hui nommé Kahnawake. L’époux d’Anne Stillman voulait également désavouer leur dernier-né, Guy, alors âgé de vingt mois, affirmant qu’il était le fils de Beauvais. Selon le docteur Frenette, ce procès avait fait la une partout dans le monde. Même s’il m’a paru parfaitement lucide, j’ai bien cru qu’il fabulait. Pourquoi un divorce mobiliserait-il autant l’opinion publique?
En septembre 1992, je me trouvais à Montréal, à proximité de l’Université McGill, avec une heure à attendre. La bibliothèque de cette institution me sembla tout indiquée pour vérifier certaines des révélations du docteur. Là, on m’informa que le New York Times, seul quotidien américain ayant un index complet et ininterrompu depuis sa fondation, s’avérerait mon meilleur outil de recherche. Avec l’intention de prendre l’index de 1922, je saisis, par mégarde, le dernier des quatre volumes couvrant l’année 1921. En apercevant les centaines de rubriques au nom de James et d’Anne Stillman, j’ai su que je tenais un sujet capable de satisfaire le volet recherche de ce qui devint aussitôt « mon projet ».
Après quelques semaines à colliger opinions et documents, j’ai appréhendé l’ampleur de l’information à rassembler. Je me revois, entrer chez mon frère, l’historien Jacques Lacoursière, lui présenter ma première caisse de dossiers et l’appeler à mon secours : « Comment vais-je faire pour ne pas me perdre? » Et je l’entends encore me répondre, le plus sérieusement du monde : « Ma sœur, tu dois d’abord établir une chronologie, même si ta biographie n’est pas chronologique. Tu dois également créer trois fichiers où tu classeras les personnages, les lieux et les événements. » Il fallait associer à chacun de ces fichiers une référence en lien avec les rubriques de journaux, les sujets traités en entrevues ou dans les livres consultés, le tout préalablement codé. Ce simple, mais précieux conseil, m’a permis de naviguer non pas aisément, mais de façon ordonnée. Qui aurait pu se douter à ce moment-là que le fichier personnages contiendrait 680 rubriques, celui des lieux, 127, et les événements, 420? Au niveau de la recherche, j’étais comblée.
Toutes les activités de cette coproduction d’envergure internationale pilotée par le cinéaste/producteur Yves Simoneau, prévue pour une diffusion en 2022, ont été mises sur pause, pour l’instant, à cause de la COVID-19.
Chères lectrices et chers lecteurs, je vous propose un voyage dans le temps où l’émotion et l’Histoire se donnent rendez-vous. J’ose espérer que cette lecture vous procurera un répit salutaire.